Antony Cordier : « Revenir au cinéma, ce n’est pas une chose qu’on décide »

Entretien avec Antony Cordier pour Classe moyenne | 2025

Qui se souvenait d’Antony Cordier ? Pas nous, puisque nous étions trop jeunes au moment de la sortie de son premier film Douches Froides (2005), et que sa série Ovni(s), récemment pilotée pour Canal+, provoquait en nous, au mieux, un poli désintérêt. Mais il suffit d’un film pour changer d’avis : la découverte de Classe Moyenne à la Quinzaine des cinéastes à Cannes en mai dernier replace Cordier au centre d’un quartier peu habité de la cartographie du cinéma français, la comédie satirique. Il nous fallait donc apprendre et comprendre auprès d’Antony Cordier les mécaniques qui rendent possible ou non l’existence d’une farce scatophile comme celle-ci, qui ne cache jamais son plaisir d’écriture ou d’exagération, sans perdre de vue la précision de l’observation sociale en cours…

Tsounami : Pour préparer le Festival de Cannes, on a rattrapé notamment Douches froides, et nous avons beaucoup aimé.

Anthony Cordier : Vous étiez un petit peu jeune quand il est sorti !

T : Ces années-là sont un peu un trou dans notre cinéphilie *rires*. En regardant un peu tout ce que vous aviez fait, il y a aussi la série OVNI(s). Comment arrive l’idée de revenir au cinéma, qui plus est avec une comédie qui reprend certains des thèmes que vous avez déjà travaillés, notamment la lutte des classes ?

AC : Revenir au cinéma, ce n’est pas une chose qu’on décide. Moi, j’adore le cinéma. Si je pouvais, je tournerais un film par an. Peu de gens font ça. Il y a Quentin Dupieux et François Ozon, mais je ne sais pas comment ils font, comment ils arrivent à se faire financer aussi facilement. Moi j’ai toujours adoré faire du cinéma, et la série était aussi là pour me permettre de faire mon métier quand, justement, je n’arrive pas à monter des films qui sont un peu plus longs à financer. Ça me permet aussi d’être sur un plateau, de diriger des acteurs, de créer un découpage, une mise en scène. Réalisateur, c’est un métier un peu bizarre : on ne le pratique pas très souvent, même quand on a la chance de tourner quelques films ou séries. Il n’y a pas tant de mes journées que je passe sur un plateau. Et en même temps, vous êtes censés être le chef, le capitaine du navire, alors que vous êtes quasiment celui qui a le moins tourné. Mon chef-op a fait 40 films, j’en ai fait 4. C’est toujours un peu particulier… 

Et à propos des thèmes, on y revient un peu par goût. J’aime bien l’observation sociale, en général. Il y en a toujours un peu dans mes films. Dans Douche froides, c’est la question d’une polarité entre les classes défavorisées et les classes privilégiées. J’ai retrouvé ce thème là, avec ce film, mais je n’ai pas écrit la première version du scénario, ce sont les deux autres scénaristes, Jean-Alain Laban et Steven Mitz. Moi, ça m’a permis d’y revenir. Je ne l’aurais pas forcément fait de moi-même car je l’avais déjà un peu traité avant, mais comme c’est venu d’eux, ça m’a un peu libéré par rapport à ça.

T : La force du film, c’est de faire une comédie populaire, voire une farce. Ça permet de mettre les mains dans la matière, mais c’est quitte ou double. C’était aussi un désir à la base, ou est-ce que c’est venu plus tard, par exemple au moment du casting ?

AC : Je trouve intéressant d’essayer de faire un film populaire, ouvert, que n’importe qui pourrait voir, que mes parents pourraient aller voir au cinéma par exemple, ou bien mes oncles et mes tantes. Et en même temps, je voulais essayer de faire un film qui ne soit pas juste potache ou fait de gags burlesques, mais qui essaie aussi de parler d’une certaine situation sociale en France aujourd’hui. Je voulais qu’il y ait une thématique, par exemple avec l’insatisfaction des personnages qui ne sont jamais contents de leur sort, qui ne sont pas contents de l’endroit auquel ils sont assignés. D’essayer de faire une comédie intelligente tout simplement, et donc de marcher un peu sur deux pieds, un pied dans la comédie populaire et un pied dans la comédie d’auteur.

T : Vous castez Calamy et Ramzy dans les rôles des employés, ce qui crée aussi une forme d’égalité de popularité entre les deux couples. Prendre des acteurs non-professionnels ou moins connus pour le couple défavorisé aurait donné un tout autre film.

AC : Je n’aime pas tellement les acteurs non-professionnels. J’adore le métier d’acteur. Par exemple, je suis un très mauvais acteur. J’adorerais ! Quand on est sur un tournage, ils ont l’air de s’amuser, on a envie d’être devant la caméra et de faire comme eux. Mais je suis épouvantable, donc je sais que c’est super difficile et je les respecte. Ça m’intéresse de voir leur art, de voir ce qu’ils sont capables de faire. Je ne recherche pas le naturel à tout prix. Il y a des directeurs qui vont être intéressés par les acteurs non-professionnels parce qu’on va faire comme dans la vie, on va jouer comme dans la vie, donner l’impression qu’il n’y a pas de caméra, etc. Ça donne des films magnifiques. Moi, ce n’est pas mon plaisir, ce n’est pas ce que je recherche. J’aime bien quand les dialogues sont écrits, quand on a pesé chaque mot, quand on n’est pas forcément dans l’improvisation. Il y a parfois une théâtralité, ça peut être un peu outré. Dans Classe moyenne, il y a un côté farce, et le film évolue. Il est sur un registre un peu réaliste au départ, un peu grinçant, et puis à la fin on va un peu dans le grand guignol. Ce sont des styles qui m’intéressent, avec des spectateurs qui me diront que ça va trop loin, etc. Mais je trouve intéressant d’essayer d’aller loin et de voir le sens que ça produit.

T : Et puis les acteurs viennent chargés de leur persona. Elodie Bouchez vient avec une carrière qui la précède et qui la met presque en scène de manière autonome. Si par exemple Laure Calamy et Ramzy avaient été remplacés par des acteurs non-professionnels, le film aurait pu ressembler à du Ostlund. Est-ce une référence qui vous inspire ?

AC : Oui, ça m’inspire. J’aime beaucoup la satire, je trouve ça très intéressant. Il y a un réalisateur norvégien qui avait sorti deux films l’année dernière, Kristoffer Borgli, Sick of Myself (2022) et Dream Scenario (2023). Ce sont des vrais films de scénario, avec des situations très étranges qui vont très loin dans la férocité et la méchanceté. Ces registres m’intéressent et ne sont pas beaucoup utilisés en France. La comédie à l’italienne va un peu loin, mais on est un peu prudents avec ça. Ça n’existe pas en grand nombre en France.

T : Pourquoi ? Le goût du public ?

AC : Je pense que la comédie a évolué. Dans les années 1970-1980, la troupe du Splendid faisait des films méchants avec des personnages méchants, où il y avait de l’observation sociale. Les Bronzés (1978), ce sont des monstres dans lesquels on se reconnaissait, on se disait que ah la la, c’est vraiment le monde d’aujourd’hui, le Club Med, les classes moyennes qui vont en vacances au ski, on a l’impression de gagner de l’argent… Ça parlait vraiment de la société, c’était féroce. Dans les années 1990-2000, quand Les Nuls sont arrivés et se sont emparés de la comédie, on s’est plutôt inspirés d’un humour anglais. C’était les Monty Python, il fallait que l’humour soit absurde. Dans les films d’Alain Chabat, il n’y a pas d’observation sociale, ça ne les intéresse pas. Ils font un film au Festival de Cannes parce que c’était Canal+ et Didier est journaliste de foot. C’est très peu intéressant socialement. L’humour absurde a pris le dessus et ça donne aujourd’hui Quentin Dupieux. Ce qui est drôle, c’est que ça ne veut rien dire, et les films inspirés de la comédie italienne se sont raréfiés.

T : Partant de votre désir d’un film très écrit, est-ce que cela laisse de la place à l’improvisation sur le tournage ?

AC : J’en ai parlé avec les comédiens tout à l’heure. Elodie Bouchez disait qu’il n’y avait quasiment pas d’improvisation et c’est vrai qu’on en fait très peu. Bien sûr, il y a toujours des propositions des acteurs, mais c’était un tournage très court : 25 jours, alors qu’en général, c’est plutôt 35-40 jours. C’était vraiment un film à petit budget. Donc il n’y a quasiment pas d’improvisation, aussi parce qu’on n’a pas le temps d’en faire. Il faut être très structuré, organisé. Mais il y a quand même des petits moments. Par exemple, la scène de jacuzzi avec Bouchez et Calamy : le suçage de pied n’était pas indiqué au scénario, elle devait simplement le lui masser. Et en jouant cette scène, on se dit qu’il faudrait essayer d’aller plus loin, que ce soit un peu plus gênant, un peu plus décalé. Donc j’ai pris Laure Calamy à part et je lui ai dit que ce serait intéressant de lui lécher les pieds. Elle m’a dit que c’était génial ! « Bon, tu dis rien à Elodie, on lui fait la surprise ! » Là, elle rentre dans le jacuzzi, et quand j’ai dit action, elle est allée encore plus loin. C’est vraiment un jeu de réécriture entre le scénario, ma proposition de réalisateur par rapport à ce que je vois, et d’un seul coup l’acteur qui, parce qu’il trouve ça très drôle, va aller encore plus loin.

T : Le rythme est très réussi et la musique y est pour beaucoup. On note néanmoins dans le dernier acte un changement de rythme qui a été débattu, voire moins aimé ou pas compris par la presse. Est-ce que vous la lisez sur vos films ? Est-ce que vous êtes d’accord pour dire que la fin est mal comprise ou mal aimée ?

AC : Avec l’expérience, j’essaie de me protéger parce que ça atteint toujours. Avant, je lisais tout, mais maintenant, j’essaie de ne pas me pourrir la vie, parce que c’est difficile quand on sort un film. Attirer les gens au cinéma, c’est compliqué. On y a mis beaucoup de soin, beaucoup d’efforts. On ne sait pas si on va avoir le droit de faire un film après. C’est vraiment des questions de vie ou de mort. J’essaie de ne pas lire la presse et j’y arrive à peu près. Après, il est évident qu’il y a une surprise à la fin du film. Je sais très bien que, non pas qu’elle n’est pas comprise, mais que c’est dur de l’accepter, parce que moi-même, quand je regarde le film, je n’ai toujours pas envie que ça arrive. Quand j’avais lu le scénario la première fois, ça m’avait surpris, et je trouvais que ça donnait tout son sens et tout son piquant au film. Si on a la prétention d’aller un peu loin, il faut aussi aller là où on n’a pas envie d’aller. Pour moi, ce qui se passe à la fin, ça a un sens politique assez important, même si je sais bien que ce serait plus facile d’avoir une réconciliation.

T : Un happy ending.

AC : Oui ! Où le message serait de dire qu’en France, les classes sociales peuvent communiquer, qu’on peut très bien s’en sortir même si on vient d’un milieu très défavorisé, que la méritocratie, ça existe. Évidemment, on aimerait tous que ce soit comme ça en France, mais on doit bien constater que ça dysfonctionne.

T : Justement, la construction de l’espace à la fin est presque pensée comme un western, avec les uns et les autres de chaque côté. Le personnage de Samy est au milieu et donnerait presque le véritable sens du titre : la classe moyenne, celle qui est littéralement au milieu et entre les deux autres.

AC : Exactement, comme sur l’affiche.

T : Est-ce que vous vouliez aussi montrer une sorte d’actualisation de la famille traditionnellement plutôt conservatrice, plutôt de droite, plutôt aisée ? Par exemple, le personnage joué par Noée Abita capture quelque chose de cette nouvelle génération de droite.

AC : Je ne sais pas s’ils sont de droite. Quelqu’un m’a posé la question dans un débat : ils votent pour qui ? On pourrait dire, oui, ils votent à droite, évidemment. Mais ce n’est pas si évident. Par exemple, Élodie Bouchez joue une comédienne, et dans le cinéma les gens sont plutôt à gauche. Leur couple s’intéresse à l’art, c’est une maison d’architecte, c’est lui qui cuisine, il a un potager bio, ce n’est pas une structure absolument traditionnelle. Peut-être qu’ils sont très bobos. Certes, ils aiment l’argent, mais on aime l’argent aussi à gauche. Je ne saurais pas dire pour qui ces personnages votent. Je viens d’un milieu populaire, ces classes ont souvent voté à droite, et ces 40 dernières années sont devenues un peu plus conservatrices, voire réactionnaires, et se sont allées jusqu’à adhérer aux thèses du Rassemblement National. Les choses sont plus complexes que ça, que droite-gauche. Typiquement, le personnage de Noée Abita sort un peu d’une lecture habituelle. Elle est sans foi ni loi ! Mehdi s’en est sorti, il a un beau diplôme, il va gagner de l’argent, et elle essaie d’être comédienne. Mais ont-ils vraiment les mêmes chances ? Il y a cette scène, que j’aime bien, où elle ment à la réalisatrice, tandis que lui est terrorisé à l’idée qu’elle se fasse choper, et elle répond quand bien même, il ne lui arriverait rien. C’est parce qu’elle sait qu’il ne lui arrivera rien de grave dans la vie. Et lui sait qu’il n’a pas les codes, pas la bonne tête, il a une tête d’arabe et il se dit que si la police s’adresse à lui, ça va mal finir. Il a peur et il y a des choses qu’il ne saura pas faire, comme mentir pour réussir, au contraire de Garance, qui a cette culture. Dans leurs différences, au-delà des questions d’argent, il y a aussi ce qu’on porte culturellement en soi, ce qu’on est capable de faire ou pas. 

T : La scène de fin au commissariat est vraiment magnifique. Elle fait penser à France, de Bruno Dumont. C’est un des plus beaux films de ces dernières années, et on pense à Léa Seydoux à ce moment.

AC : J’aime beaucoup Léa Seydoux, même si je n’ai pas pensé à France (2021) en particulier. Le film s’ouvre sur l’éclat de rire de Noée Abita, très juvénile, enthousiaste, frais, coupé-cut, et se termine aussi sur un éclat de rire de Noée Abita coupé-cut. Ça forme un arc dans le film, et évidemment son dernier éclat de rire est glaçant. On n’a pas envie de rire avec elle. L’idée, c’était qu’elle devienne une sorte de joker à la fin, avec cet espèce de maquillage qui coule.

T : Et puis il est aussi question de la sincérité de ce rire, parce qu’il y a la question d’arriver ou non à pleurer. Lorsqu’elle y arrive, son rire devient polysémique : serait-elle enfin émue ou profondément cynique ?

AC : Oui, oui, on peut, et je n’ai pas envie de donner la réponse ! Est-ce qu’elle pleure parce qu’elle est vraiment émue ou parce qu’elle a eu un déclic d’actrice qui fait qu’elle sait maintenant faire des fausses larmes et qu’elle s’en réjouit ? Voilà, c’est un peu des deux. Alors, il y a évidemment un peu de caricature dans le film, c’est très assumé, mais j’essaie de ne pas être trop manichéen. Je pense qu’on est tous un peu contradictoires. Sur ce personnage, j’essaie de ne pas être trop caricatural et de me dire qu’elle a des affects qui la traversent, une forme de tristesse qu’elle arrive à réutiliser parce qu’elle est très forte. Ce film, c’est un peu la naissance d’un petit monstre. Pour le choix du casting, c’était tout de suite évident, par exemple. Noée Abita est très très forte dans ce rôle de jeune femme froide et riche qui a conscience de ses privilèges. 

T : À quel moment intègre-t-elle le processus ?

AC : C’est jamais évident un casting. D’abord, il faut rencontrer les comédiens, il faut qu’on s’entende bien, il faut qu’on ait envie de travailler ensemble. C’est pas seulement, ah tiens, tel acteur est super, je le verrais bien dans le rôle, et tu le mets dans la case. Les castings, c’est à double sens. Moi aussi je passe un casting quand je rencontre un comédien. Il me regarde, il essaye d’estimer si ce que j’ai envie de faire va être intéressant ou pas, s’il va être à l’aise dans cet espace de jeu que je vais lui proposer. Donc je fais souvent des recherches. Pour Garance, je n’avais pas forcément d’intention très marquée, ça pouvait être plusieurs registres de comédiennes. J’ai fait des petites séances de travail avec les comédiennes et j’ai rencontré Noée à cette occasion. Ce truc très juvénile, très innocent, tout en ayant à l’intérieur un caractère bien trempé, qu’elle proposait dans son jeu était vraiment intéressant pour le personnage.

T : Vous l’aviez déjà vue dans d’autres films ?

AC : Ah oui, bien sûr ! En plus des premiers rôles. J’avais vu Ava (Léa Mysius, 2017, ndlr) et je l’avais vraiment adorée dans Les Passagers de la nuit (Mikhaël Hers, 2022, ndlr). C’était dans les années 1980, j’ai bien connu. Elle jouait une petite routarde un peu paumée et je l’avais trouvée très impressionnante, très juste, et très justement placée dans le cinéma de Mickaël Hers par rapport à sa douceur. C’est là que j’ai eu la révélation, que c’était vraiment une super actrice.

T : Et il a fallu trouver un contre-point avec le personnage de Samy. Pareil, quel a été le processus ? Il était un peu moins connu.

AC : Oui et non. Samy, normalement les jeunes le connaissent parce qu’il a joué dans Sex Education, et là il a fait la série Cultes sur Loft Story. Comme il vient de la série, souvent, on le reconnaît un petit peu. On l’a moins vu au cinéma, mais je me souviens de son rôle dans Une histoire d’amour et de désir (2021). Je l’avais trouvé extraordinaire ! Donc j’avais repéré son nom et j’avais dit à ma directrice de casting que dès qu’on aurait un truc, je lui proposerai. Et là, coup de bol parce que le film lui donnait un rôle assez important, central, avec beaucoup de choses à jouer, des émotions différentes. Il a reçu le scénario à 14h, il a appelé à 14h45 pour dire qu’il voulait me rencontrer. Donc avec Samy c’est allé très vite !

T : Ses origines algériennes étaient importantes pour le personnage ?

AC : Oui. Dans le scénario original, il n’y avait que des blancs, et l’idée était de décrire un petit peu la situation en France, aujourd’hui. Je trouvais intéressant que des personnages d’origine maghrébine puissent incarner la problématique du transfuge, c’est-à-dire le prix à payer pour quitter son milieu d’origine. Dans ce cas, c’est non seulement un milieu social, mais ce sont aussi des racines, une culture… Est-ce que je dois m’intégrer, m’assimiler ? Est-ce que je serai bien avec une blanche ? Est-ce que ça a un sens ? Est-ce qu’on s’en fout ? Est-ce que, finalement, quand je vais rencontrer mes beaux-parents, il va y avoir quelque chose de l’ordre de la gêne ? D’un seul coup, ça devient très riche. Et donc, le fait que ces personnages portent la question du transfuge de classe, je trouvais ça intéressant.

T : Et pour le reste du casting ?

AC : Elodie Bouchez, c’est particulier parce que c’est la quatrième fois qu’on travaille ensemble. A chaque fois qu’il y a une opportunité sur un rôle, je pense toujours à elle. Je dirais donc qu’il y avait là une évidence liée à notre envie de tourner ensemble, de profiter de la confiance qu’on a bâtie au fil des années. C’est bien de se retrouver, c’est très agréable. C’est quelqu’un qui fait vraiment confiance au metteur en scène. Et puis moi, comme spectateur, j’adore la regarder travailler sur un plateau et essayer de l’aider, lui proposer mon regard… Pour Laurent Lafitte, c’était presque dangereux, parce que le rôle avait l’air d’être écrit pour lui. Quand on lit le scénario, on a l’impression de l’entendre. On se disait presque que c’était un peu trop ajusté par rapport à lui. Finalement, il a dit oui tout de suite.

T : Laurent Laffite qui joue un gros connard, c’est presque une évidence.

AC : Laurent a ce registre de jeu où il peut être parfaitement odieux et presque le porter sur son visage. En tant que spectateur, on trouve ça délicieux. On devrait lui être reconnaissant de jouer le connard parce qu’on a envie de se marrer.

T : Quels retours avez-vous eu du public ?

AC : J’ai fait beaucoup de débats, 14 débats. C’est quand même pas mal. D’abord, les gens viennent dans la salle, ils savent à peu près où ils mettent les pieds, donc ils sont intéressés par le film. C’est toujours un peu galvanisant. Le retour, qui est assez unanime, c’est de dire que les acteurs sont super. Ça, je l’entends à chaque fois. On vient de parler de tout le casting et c’est vrai que ça fait vraiment effet troupe. Là où je suis content, c’est qu’on dit que c’est très équilibré. Ils sont tous biens, et en même temps, il n’y a pas un acteur qui ressort par rapport aux autres… C’est vrai que c’est un film un peu choral, avec des acteurs très connus, comme Laurent Lafitte, et puis il y a ceux qui le sont un petit peu moins, comme Noée ou Samy, et puis il y a aussi Mahia Zrouki, que personne ne connaissait, et que j’avais vu dans un court-métrage. Donc qu’ils puissent être tous à égalité et aussi bons, ça me fait plaisir.

Entretien réalisé à Paris le 17 septembre 2025,
Par Nicolas Moreno et Zoé Schulthess Marquet,
Retranscription : Grégoire Benoist-Grandmaison