Atlantiques (2009) / Dahomey (2024) – Mati Diop
La demi-teinte Dahomey n’enlève rien au talent de Mati Diop. Revisionner en préambule de l’avant-première française (en ouverture du festival) son court-métrage Atlantiques datant de 2009 en est la preuve criante. Là où le premier (qui est son dernier) se laisse éprendre d’artificialités multiples (musiques omniprésentes, ralentis distingués, facticité de la diffusion des discours dans les villes), le second (qui est son premier) fait l’entière place aux échanges, aux paroles, aux discussions des jeunes hommes, sans que quelconques sophistications cinématographiques ne puissent prendre la lumière.
Les lueurs d’Atlantiques proviennent de cette justesse granuleuse d’un témoignage qui prend son temps. Le film est court (15 minutes) et pourtant la longueur des plans ouvre une densité et une profondeur rafraîchissantes. Redécouvrir sur grand écran ce Diop d’il y a quinze ans est une offrande merveilleuse que le festival nous a permis. Nous rappelant joyeusement que derrière les rugissements de l’ours, une épure et une simplicité d’or résident. La cinéaste a du génie quand elle laisse place aux traces vivantes et aux paroles prégnantes de la jeunesse d’ailleurs. Mais il ne faudrait pas être médisant, derrière la relative déception se trouve la clairvoyance de ces indices (captations d’allocutions importantes, déclarations rares et brillantes d’universitaires Béninois et Béninoises).
Dahomey, bien qu’il le souhaiterait, n’a pas la puissance d’Atlantiques, mais il a des éclairs (mises en images d’instants rares au sein des musées d’un pays et de l’autre, et tentatives formelles robustes, telles la voix-off anxiogène d’une statue ou son âme et le mixage ardent des espaces). Mati Diop n’a rien perdu, elle a juste forcé l’impression. Et peut-être bien qu’elle a eu raison, car ce qu’elle montre est malgré tout d’une importance vitale. L’exigence esthétique n’est finalement qu’une somme de nos balivernes critiques, sourde des cris éloignés et figée hors des corps.