Omar la Fraise

Critique | Festival de Cannes 2023 | Sélection Officielle (Séance de Minuit)

Chi-Fou-Mi continue à faire ce qu’ils font le mieux : n’en avoir rien à foutre du réel. Cette fois-ci ce n’est pas le quinzième copié-collé absurde de Quentin Dupieux – devenu bankable sans doute parce que ses films ne racontent et ne coûtent rien à part un beau cachet pour les acteurs – auquel nous avons à faire. Non, cette fois-ci, les parents du nouveau né sont plutôt à chercher du côté d’un coït parfaitement logique entre Le Monde est à nous et des publicités de l’Office du Tourisme de Dubaï. Alors bon, au début, on est quand même assez séduits par ce duo improbable, et on sent que Magimel ne porte plus le costume blanc comme avant ; Pacifiction y est pour quelque chose. Il est plus drôle, plus libre, plus massif que jamais. Mais rapidement, entre les hurlements des deux comédiens (censés nous faire rire) et le surgissement d’une romance insipide, le film finit par écœurer. Passé le troisième spot, cette fois-ci pour montrer à quel point le jet ski en Algérie, c’est génial, le réalisateur se propose même le luxe d’innover dans la représentation des relations amoureuses au cinéma : l’homme veut, la femme ne veut pas, mais finalement la femme sera séduite et l’homme comblé. A partir de là, on s’emmerde, on grince des dents, et on attend le générique, jusqu’à une ultime pirouette lunaire et malvenue : l’ex-malfrat et sa jolie femme prennent sous leur aile – dans leur énorme 4×4 – les petits sauvageons des quartiers d’Alger. On se demande bien ce que cette image d’Épinal propose comme morale, et puis on comprend vite qu’on s’en fout : ça permet de faire un ultime placement de produit, ça fait joli à la caméra, et c’est tout ce qui compte pour eux. Non, le réel n’est pas leur affaire, et leur cinéma pas le nôtre.

Omar la Fraise d’Elias Belkeddar, sortie le 24 mai 2023